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Comment allons-nous vivre maintenant ?



« Qu’allons-nous faire ? Comment allons-nous vivre maintenant ? »
13 mars 2020


Quand j’écrivais au début de ce carême que nous allions tous vivre une vraie « quarantaine » pour se recentrer sur l’essentiel, je ne savais que cela allait être prophétique !

Ce vendredi 13 matin, la Belgique s’est réveillée « groggy » : Les décisions du gouvernement provisoire, suivant les propositions du comité de sécurité nationale, ont des répercussions en cascade qui impactent déjà la vie sociale, économique, culturelle, sportive… et même religieuse. De mémoire d’homme en effet, on n’a jamais vu de culte suspendu volontairement à cette échelle ou d’églises fermées, même en temps de guerre.

« C’est du jamais vu, du jamais connu », entend-on de toutes parts. Les journaux tv ou radio relaient en boucle les consignes officielles et les questions des gens. Pour l’instant, on ne peut même pas deviner à quel niveau la situation économique va dégénérer. L’effet domino joue à plein. Et l’anxiété - voire la panique – va croissant. 
Cela montre à quel point notre société avec son modèle socio-économique est devenu fragile, à cause de son interdépendance extrême. Le coronavirus Covid-19 a flanqué un énorme coup de pied dans la fourmilière humaine qui s’écroule comme un château de cartes… comme les bourses qui connaissent leur pire crash depuis peut-être 1929.

Nous, humains du 3ème millénaire, avions une confiance « aveugle » dans le système qui nous procurait travail (pour certains), sécurité (pour certains), loisirs, délassement et voyages (pour certains), et une organisation sociale, médicale, juridique, politique et financière qui garantissait tout cela. Pour couronner le tout, les prouesses de la technologie nous faisaient nous croire invincibles :  Puisque la Science pouvait –nous disait-on –  résoudre tous les problèmes, et promettait un avenir de progrès ininterrompu, on pouvait se permettre de voyager sans cesse en avion d’un bout à l’autre de la planète sans se poser de questions, de consommer en une seule année une fois et demie la capacité de production de la planète, d’exploiter et de détruire les forêts, les mers, la terre pour faire fonctionner –au profit d’une petite partie seulement de l’humanité – une machine économique qui s’emballe de plus en plus, de polluer définitivement notre environnement en stockant des matières hautement irradiées, etc.

Sans compter que les vraies victimes de ce système, les peuples du Sud principalement, mais aussi tous les exclus de la croissance, n’ont même pas le luxe, eux, de se tracasser sur la question qui nous préoccupe aujourd’hui : « Qu’allons-nous faire, qu’est-ce qui va se passer ? ». Leur question à eux, c’est la survie aujourd’hui seulement.

Quelques experts, quelques militants lucides avaient bien déjà tiré la sonnette d’alarme depuis longtemps : on les a traités d’écologistes dogmatiques ou de communistes enragés. On ne les a pas écoutés : allez-voir ailleurs, j’ai un avion à prendre…

Je le confesse, je suis moi aussi un des bénéficiaires de ce système. J’ai profité à plein des facilités qu’offre la société occidentale moderne. La « faute » n’est pas individuelle , c’est une machine, un Baal  qui dévore ses enfants ou qui en fait ses esclaves. Esclave des loisirs, de la consommation effrénée, des comportements individualistes ou égotiques en matière de circulation, d’accès aux biens de santé, de culture, de sport et bien sûr de profit. Nous avons bien facilité la vie à ce minuscule grain de sable qui est venu gripper la machine , cet avorton invisible nommé Covid-19 et qui est en train de devenir le Maître du monde !

Dur réveil !!  Mais peut-être salutaire… 
Pour la première fois, ce matin, on n’a pas entendu la litanie des ralentissements autour de Bruxelles ! « La circulation est fluide ce matin. » Ça alors ! Et l’atmosphère polluée des grandes villes chinoises est enfin devenue respirable, photos satellites à l’appui…

Je ne peux m’empêcher de penser à ce passage du livre de Daniel (2,31-45) dans la Bible, où Daniel interprète la vision du roi Nabuchodonosor qui avait conquis un immense empire qu’il voulait lui aussi éternel  :

Ô roi, voici ta vision : une énorme statue se dressait devant toi, une grande statue, extrêmement brillante et d’un aspect terrifiant. Elle avait la tête en or fin ; la poitrine et les bras, en argent ; le ventre et les cuisses, en bronze ; ses jambes étaient en fer, et ses pieds, en partie de fer, en partie d’argile.
Tu étais en train de regarder : soudain une pierre se détacha d’une montagne, sans qu’on y ait touché ; elle vint frapper les pieds de fer et d’argile de la statue et les pulvérisa.
Alors furent pulvérisés tout ensemble le fer et l’argile, le bronze, l’argent et l’or ; ils devinrent comme la paille qui s’envole en été, au moment du battage : ils furent emportés par le vent sans laisser de traces. Quant à la pierre qui avait frappé la statue, elle devint un énorme rocher qui remplit toute la terre.
Voici le songe ; et maintenant, en présence du roi, nous allons en donner l’interprétation.

Comme l’empire du roi Nabuchodonosor, notre civilisation moderne est aussi un colosse aux pieds d’argile. Et ses moyens sophistiqués de transport, de commerce et même de communication, se retournent aujourd’hui contre elle…

Alors, qu’allons-nous faire ? En tant que citoyens et en tant que 
chrétiens ?   

-D’abord, ne pas paniquer. Nous n’allons pas retourner au Moyen-âge. 
Mais peut-être allons-nous par la force des choses, après avoir subi l’inconfort et les casse-têtes des programmes perturbés et des projets annulés, des solutions d’urgence à trouver, et si évidemment nos moyens d’existence ne sont pas gravement menacés… alors peut-être en bout de course allons-nous retrouver d’autres formes de relations et de travail, des plaisirs plus simples  (et moins coûteux), la joie d’aller se promener avec ses enfants dans les bois ou dans les champs, de pratiquer la lecture, de jouer en famille, d’aller papoter avec ses voisins dans le jardin, d’écouter RCF (la Radio Catholique Francophone), bref, des loisirs un peu oubliés, mais si nourrissants et apaisants au plan humain. 
Moins consommateurs d’énergie fossile et de pécunes.

Ensuite, eh bien, je pense que dans cette crise, il y a aussi pour chacun de nous un appel à se montrer attentifs et solidaires de ceux qui seront les principales victimes de cette épidémie : les personnes âgées, les malades et les gens atteints par le virus, qui sont souvent des personnes déjà fragilisées dans leur santé et leur capacités à se défendre. Nous ne sommes pas tous égaux devant la maladie. 
Le message du cardinal Turkson (préfet du dicastère romain pour le développement humain intégral), publié le 12 mars sur Cathobel, le dit très justement (voir page spéciale sur le blog) :

Je ne peux que m’associer à la conclusion du cardinal, que je vous adresse également, chers frères et sœurs, avec toutes mes pensées et mes prières pour ceux qui seront privés d’eucharistie ce week-end et les dimanches suivants, mais aussi pour nos frères aînés confinés au Couquemont ou chez eux, les malades et ceux qui les assistent, les médecins et infirmières qui avec un dévouement inlassable, sont en première ligne… 
Je vous encourage avec tous nos évêques et nos pasteurs, à continuer notre montée vers Pâques, cette « quarantaine », avec un esprit de foi et de charité renouvelé, car si le Seigneur permet l’épreuve du désert, cela a toujours été pour un renforcement de l’Alliance avec son peuple, et pour vivre l’expérience libératrice de la confiance et de la solidarité.

Si toutes les messes dominicales sont suspendues jusqu’à nouvel ordre, ainsi que les activités de rassemblement (La Solidari’fête le 15/3 à Ottomont, la Récollection de Carême du 22/3 à St Fiacre et le déjeuner solidaire du 29/3 à Mont avec la messe du 5ème dimanche), il est bon de rappeler qu’on peut regarder la messe sur France 2 chaque dimanche à 11h00 ; c’est un moyen d’être en communion et nourri par la Parole et la communion fraternelle. La chaîne Radio 1RCF (sur internet ou Dab+) également. « Prions en Eglise » est aussi un bon outil quotidien. Et sur le net, les propositions chrétiennes de prière ne manquent pas… 

A nous d’être inventifs pour continuer à nourrir notre foi. Je tâcherai de vous faire parvenir de temps en temps une homélie, de ma plume ou d’un prêtre internaute.  

N’oublions pas de prendre contact régulièrement avec les personnes seules de notre entourage, que ce soit par Facebook, Email ou Skype. Le téléphone reste un lien indispensable pour beaucoup de nos aînés.

Les responsables pastoraux de notre Unité Pastorale et du Doyenné se réuniront régulièrement pour évaluer la situation, répondre aux questions et proposer des actions pour faire face aux besoins, qu’ils soient matériels ou spirituels. N’hésitez pas à les contacter, pour faire part de vos interrogations ou suggestions. Le numéro d’appel du Secrétariat Pastoral du Sacré-Cœur Dison-Andrimont est le 087/34.00.75 (lundi et jeudi matin), le mien est le 087/350 375.

Demandons à l’Esprit Saint d’éclairer les efforts des scientifiques, des agents de santé et des dirigeants et confions toutes les populations touchées par la contagion à l’intercession de la Vierge Marie, Mère de l’humanité. 
  
En communion fraternelle avec chacun-e de vous,
       
Bernard Pönsgen, prêtre

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