Tout est devenu très calme aujourd’hui. Ce que nous
vivons est du jamais vu. Nous pensions que de tels événements ne pouvaient plus
se produire, jadis peut-être et sans doute ailleurs mais sûrement pas dans une
société développée comme la nôtre. Nous nous sentions seigneur et maître,
intouchables. Le coronavirus Covid-19 nous enlève cette illusion : nous ne
maitrisons pas tout, nous sommes des êtres fragiles et vulnérables, non
seulement ici ou là, mais partout dans le monde.
Dans cette insécurité et cette angoisse germe cependant
un signe d’espoir et de force : on constate en effet, l’ampleur de la
solidarité au sein de notre société. On tente parfois de résoudre les problèmes
et les défis auxquels on est confronté en les maintenant hors de nos
frontières, mais le virus ne connaît pas de frontières. Dieu nous a confié
cette terre, c’est notre maison commune. Nous sommes responsables les uns des
autres.
Notre attention va en premier lieu aux victimes du
virus : ceux qui sont contaminés, ceux qui sont hospitalisés,
principalement ceux qui en sont décédés et les familles qui vivent cela de très
près. Notre reconnaissance est très vive à l’égard de tous ceux qui leur sont
proches : les médecins, le personnel soignant et les nombreux bénévoles. A
l’égard aussi de ceux qui continuent d’assurer les services indispensables
malgré l’arrêt de la vie sociale.
En tant que dirigeants religieux de notre pays, nous
exprimons toute notre estime à ceux qui luttent résolument contre le virus. Nous
disons notre gratitude pour l’aide à ceux qui subissent de grandes difficultés
financières suite à cette épidémie. Nous tenons également en haute estime le
sens des responsabilités dont fait preuve la population de notre pays. Un
excellent système de soins de santé a pu être mis sur pied dans notre pays au
fil des ans. Nous réalisons plus que jamais son importance pour l’avenir.
Nous sommes obligés de garder nos distances, mais cela
ne peut nous empêcher de rester unis plus que jamais. Au travers de nos
diversités culturelles et religieuses, c’est notre humanité qui nous lie profondément
les uns aux autres. Qui que nous soyons et quelles que soient nos convictions, nous
sommes des compagnons de route, responsables les uns des autres.
Nos communautés ne peuvent plus se rassembler pour
prier dans les synagogues, les églises et les mosquées. Mais la solidarité et
le devoir de la prière restent toujours d’application. Nous vous adressons un
appel pressant : prions chacun selon sa propre tradition, pour les malades
et les mourants et ceux qui les assistent. Prions les uns pour les autres et
pour notre pays. Prions pour qu’à travers cette crise, nous puissions discerner
ce qui est important dans la vie. Plus que jamais nos armes sont aujourd’hui la
prière et la solidarité.
Nous attendons tous la fin rapide de cette crise. Mais
nous espérons aussi, qu’une fois passée, nous n’oublierons pas trop vite ce qui
nous est arrivé. Car qui oublie, accroit sa fragilité. Cette crise peut nous
ouvrir les yeux et nous aider à revoir nos priorités, tant dans notre vie
privée que dans la vie en société. Puissions-nous, une fois la crise passée, nous
souvenir que dans nos diversités, nous avons besoin les uns des autres. Cherchons
de nouvelles formes d’hospitalité, de fraternité et de solidarité. Les
religions peuvent jouer un rôle important dans cette recherche et cette
redéfinition de nos priorités. C’est au nom de cette responsabilité que nous,
leaders religieux de notre pays, prenons ici la parole.
Les chefs
de cultes de Belgique
Au nom des communautés
juives, chrétiennes et musulmanes :
Cardinal Jozef De Kesel, Pasteur Steven
Fuite, Grand Rabbin Albert Guigui, Dr. Geert W. Lorein, Maître Philippe
Markiewicz, Chanoine Dr. Jack McDonald, Monsieur Mehmet Üstün, Métropolite
Athenagoras Peckstadt.